Page:Le Tour du monde, nouvelle série - 10.djvu/152

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lante, et des améliorations dans le service pourraient être plus rapidement apportées ; mais la Corée n’a pas reconquis assez d’indépendance pour faire disparaître ce rouage administratif étranger.

On peut juger le degré de civilisation d’un pays d’après la façon dont on y rend la justice et d’après les pénalités qui sont infligées aux coupables. Quand le Japon voulut supprimer les juridictions consulaires desquelles dépendaient les étrangers, suivant leur nationalité, il dut réformer son Code et l’adapter aux idées occidentales ; il fit appel à la magistrature française et reçut les conseils de quelques-uns de nos professeurs de Facultés de droit. De même, l’empereur de Corée a choisi, comme conseiller judiciaire, l’ancien président de tribunal d’une de nos grandes colonies. La tâche de notre compatriote sera ardue, s’il est chargé de modifier des abus séculaires, de changer les procédés sommaires de la justice orientale et de faire entrer dans l’esprit des juges coréens les idées d’équité et d’impartialité. Jusqu’ici le bon droit dépendait de la richesse ou de la position des plaideurs, et une affaire, dans laquelle un eunuque se trouvait mêlé, était infailliblement perdue par l’adversaire. Notre compatriote fera donc œuvre utile et bienfaisante s’il réussit dans sa mission, malgré les obstacles intéressés qu’il est sûr de rencontrer. En tout cas, c’est un hommage que l’empereur a rendu à la France en lui demandant un conseiller judiciaire.

ARC DE TRIOMPHE ÉLEVÉ À SÉOUL EN L’HONNEUR DE L’IMPÉRATRICE ASSASSINÉE. — DESSIN DE MASSIAS.

Les pays, tels que la Belgique, la Suisse, protégés par une neutralité reconnue de tous, ne se sentent pas suffisamment rassurés par l’appui que leur prêteraient les puissances voisines en cas de guerre. Ces nations estiment que, malgré leur population peu nombreuse, elles peuvent mettre en ligne une armée de quelque importance et que leurs contingents militaires sont la meilleure sauvegarde de leur indépendance. La Corée, avec ses dix ou quinze millions d’habitants, doit obéir aux mêmes préoccupations et convaincre ses deux voisins que la victoire dépendra, peut-être, des bataillons qu’elle prêtera à l’un ou à l’autre des combattants. Li-Hsi est entré de bonne heure dans ces vues et, voulant réorganiser son armée, il avait demandé des instructeurs russes, ce que le Japon représentait comme une violation de la convention de Moscou. Deux officiers français, un capitaine d’artillerie et un contrôleur d’armes, viennent d’arriver pour créer un arsenal et différents établissements militaires. Avant l’expédition de Chine, des pourparlers étaient engagés et sur le point d’aboutir pour envoyer une mission plus complète, mais on espère que ce retard ne sera que momentané, et qu’un jour viendra où l’armée coréenne, désireuse de s’instruire depuis longtemps, retrouvera, sous la direction de nos officiers, ses qualités d’autrefois et ne le cèdera à aucune autre en Extrême-Orient. Elle est, pour l’instant, armée de fusils Gras, et ses officiers reçoivent leur instruction à l’École militaire commandée par le général Yi.

Avec un peu de finesse diplomatique, il était facile de faire nommer, à la cour de Séoul, un médecin français qui aurait rendu de grands services, non seulement dans la colonie européenne, mais aussi dans la population coréenne de toutes conditions. L’occasion a été manquée, et la place vient d’être enlevée, il y a quelques mois, par un médecin allemand.

Il paraît que les richesses minières sont considérables ; les Américains exploitent une concession de mines d’or qui donne des bénéfices énormes, et l’on a signalé, dans le nord de la péninsule, des mines de