Page:Le Tour du monde, nouvelle série - 10.djvu/458

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dans ce vaste espace, depuis les états-majors jusqu’aux ateliers de voilerie et de cordages. Les parties les plus intéressantes sont le pavillon Louis XV ; l’ancien bagne, occupé par l’artillerie coloniale ; la tour de la Découverte, ou tour des Signaux, élevée au xviiie siècle, haute de près de 40 mètres, et d’où l’on aperçoit l’étendue jusqu’à l’île de Groix ; le parc d’artillerie ; les frégates-casernes, etc., tout ce qui constitue une place de guerre de première classe. C’est un musée de canons et de projectiles, animé par le va-et-vient incessant des marins et des ouvriers. Mais Lorient est aussi une ville qui occupe un bon rang dans le trafic général et le commerce par eau. Le port de commerce situé, comme je l’ai dit, entre les deux parties de la ville, bordé de quais larges, d’accès facile, est sans cesse en mouvement d’arrivages et de départs ; les échanges portent sur le beurre, le poisson, les conserves, la cire, le miel, les céréales, les vins, les eaux-de-vie.

LORIENT : L’ENTRÉE DU PORT MILITAIRE À MARÉE BASSE.

Les promenades autour de la ville pourraient être nombreuses : Kerentrech, Keroman, l’étang de Ter, Plœmeur… Mais quand l’eau est là, qui vous invite, quand la grande lumière du large brille, comment résister au bateau à vapeur et à la barque à voile ! Je vais à Port-Louis, petite ville plus ancienne que Lorient, créée par Richelieu, baptisée par Louis XIII, enfermée dans de grosses fortifications, pourvue d’une belle plage et de beaux jardins où mûrissent d’excellentes figues. J’habite quelques jours une maison attenant à l’un de ces jardins. On me raconte un peu l’histoire de Port-Louis, la captivité de Louis-Napoléon en 1836 ; on me montre les curiosités, l’église du xviie siècle, le couvent des Récollets ; on me propose aussi de voir des menhirs, des alignements, aux environs, mais je préfère jouir paresseusement de la plage de sable fin, de la mer étincelante, de la vue de Larmor et de la pointe de Gavre.

C’est à Port-Louis que je prends le vapeur de Lorient, qui fait escale ici avant de filer sur l’île de Groix. Les 14 kilomètres sont vite franchis, quand le Coureau, bras de mer qui sépare l’île du continent, est comme aujourd’hui le séjour délicieux du beau temps. Un gai soleil éclaire les vagues souples ; les marsouins jouent, bondissent, font des culbutes autour du bateau. On débarque à Groix, capitale de l’île, et j’ai vite monté la rue, fait le tour de la petite place ombragée. Je reste là un jour à causer à table d’hôte avec un commissaire de marine, très élégant, très charmant, et déplorablement alcoolique, qui revient de longs voyages et me raconte un arrêt à Sainte-Hélène. Je quitte, le lendemain, cette capitale et ce compagnon toujours prêt à trinquer, à trinquer n’importe où, à chaque débit qu’il rencontre sur le port ou le long des quelques rues, et je m’en vais à la découverte par les sentiers de l’île. Comme à Belle-Île-en-Mer, j’ai