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Le dessin de l’artiste birman fut apporté et offert à l’ambassadeur de la part du roi, qui, se levant alors brusquement de son sofa, disparut à travers les longues colonnades aux portes dorées. Ce fut la dernière fois que nous le vîmes.

Sa Majesté nous avait paru excitée et mal à l’aise pendant l’entrevue, montrant peu de sa vivacité habituelle. Constamment occupé à garnir sa bouche de pân qu’il rejetait bientôt, Mendoun-Men faisait allumer son cigare qu’il laissait éteindre pour de nouveau le faire rallumer. Avant notre sortie du palais, il nous fit dire par M. Camaretta qu’il souffrait du mal de tête, ce qui nous expliquait sa retraite précipitée.

Salces ou volcans de boue à Membo, d’après H. Yule.

Après son départ nous nous entretînmes avec les atwen-woons et goûtâmes de quelques rafraîchissements. Ces messieurs étaient très-polis, nous assurant qu’ils se sentaient malheureux de l’idée de notre départ ; ce qui, je l’espère, n’était pas de leur part une politesse banale, mais un sentiment réel.

Le 21 octobre, les quatre woongyis vinrent déjeuner avec nous et nous faire leurs adieux. Ici nous récapitulerons leurs noms : le premier était le vieux Magwé-mengyi, dont la physionomie rappelait celle des Médicis ; puis le Mein-loung mengyi, vieillard corpulent et jovial, dont la figure rayonnait de cordialité. Le troisième, le pabéwoon, ou maître d’artillerie, connu sous le nom de Myadoung mengyi, était maigre, gravé de la petite vérole, fin et de belles manières ; il nous accabla de questions sur notre artillerie, son calibre et la portée des pièces. Le dernier, le pakan-woongyi, était le plus jeune des quatre piliers de l’État ; c”était un personnage bilieux d’aspect, avec de grands yeux noirs et des manières froides et compassées. Il avait été prêtre jusqu’au jour où le roi l’avait appelé à la cour.

Cônes volcaniques dans la plaine de Membo, d’après H. Yule.

Ils restèrent avec nous jusqu’à midi et furent en général fort aimables. Les trois woongyis les plus âgés se montrèrent, comme toujours, gais, plaisants et de belle humeur. Le vieux seigneur de Mein-loung parut s’intéresser fort au progrès de la guerre de Crimée, et demanda même la permission d’écrire mes réponses à ses questions. Toutes se rapportaient à la distance de l’Angleterre à Sébastopol, à Saint-Pétersbourg, et de ces villes