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entre les premiers pilastres ; les figures qui y étaient sculptées ont probablement été effacées par le temps ; mais lorsqu’on s’avance vers le fond de l’édifice, on se trouve en présence d’un tableau saisissant qui orne la face sud de l’entrée donnant accès sur la cour de l’est.

Un grand nombre de figures s’entre-croisent dans ce tableau qui, suivant les uns, représente la tentative que fit Ravan, roi de Ceylan, pour ravir le kailassa ou le ciel de Siva. Suivant d’autres, ce tableau représente la lutte qu’a été obligé de soutenir le culte des Aryas pour s’établir dans l’Inde au préjudice des superstitions indigènes, ou enfin l’une des guerres qu’ils eurent à supporter contre les dravidiens.

Siva, averti par Parvati de la tentative de Ravan, l’enferma dans la montagne qu’il voulait ébranler, en sorte que le géant est représenté tournant le dos à l’observateur. Il est armé de six bras ; sa tête a disparu dans une espèce de fruit semblable à un melon qui peut si on le veut représenter la montagne. Il y resta prisonnier dix mille ans, jusqu’à ce que son grand-père Palarti, fils de Brahma, lui enseigna le culte de Siva.

La figure en partie brisée qui est à droite du buste du Trimourti, peut aussi représenter Ravan en adoration ; car le même objet qui ressemble à un melon dont les côtes sont dessinées, couvre entièrement la tête de cet adorateur ; du reste, on a hasardé plusieurs autres explications, et quelques auteurs y croient voir le fruit qui naquit de d’Ady-Sackty, emblème femelle, duquel sortit Siva.

D’autres enfin rapportent que Sackti ou une autre déesse était contenue dans ce fruit, et que, semblable à la statue de Pygmalion, elle n’était pas encore animée lorsqu’elle en sortit. Le taureau de Siva, Nandou, lui donna la vie d’un souffle de ses narines puissantes ; mais cette vie était encore purement animale, et ce ne fut qu’après maintes aventures qu’elle reçut une âme qui lui permit de devenir un être pensant.

Un grand nombre d’autres tableaux ornent les parois qui occupent l’espace faisant face au nord, depuis la cour de l’est jusqu’à l’autel du Trimourti. Le plus curieux de ces tableaux représente Siva à la fois dieu et déesse. La partie droite de la tiare qui ceint la tête porte le croissant de Siva, et la partie gauche est ornée de bijoux féminins, ainsi que le cou et les bras. Le ciseau de l’artiste s’est surpassé dans ce tableau, qui porte le nom de Ardhinah-eshwar. La figure s’appuie sur la tête du taureau Nandou. Brahma, sur son trône de lotus supporté par cinq cygnes, est à droite de Siva ; Vishnou supporté sur Garouda est à gauche dans le fond. Indra, dont le culte était suivi par les premiers Aryens, est monté sur son éléphant. Il fut relégué au second plan après l’intrusion du brahmanisme qui changea le premier culte des Aryas.

On rencontre de l’autre côté du Trimourti, en allant vers l’ouest, un tableau également remarquable. Siva y est représenté accompagné de Parvati ; un fils leur est ne, et une servante le porte sur la hanche. La mitre de Siva semble représenter un fleuve qui s’en échappe et rappelle le confluent des trois affluents du Gange à Allahabad.

Les mêmes personnages que nous avons vus figurer dans Ardhinah-eshwar sont reproduits dans ce tableau, où l’on voit Aïravata, l’éléphant d’Indra, s’incliner pour adorer Siva.

En continuant à marcher vers l’ouest on arrive sous le péristyle qui s’ouvre sur la cour occidentale. Un tableau orne la paroi qui fait face au nord ; la lumière de la cour éclaire vivement ce bas-relief, qui représente le mariage de Siva et de Parvati.

Brahma lit les textes sacrés qui doivent consacrer cette union ; une servante pousse par les épaules Parvati, dont le seul ornement est un mince cordon autour des reins ; d’autres servantes portent des miroirs, des cruches et divers attributs. Dans ce tableau, comme dans tous les autres, les messagers et les messagères des dieux planent au-dessus de la tête des héros, et le monde inférieur est représenté par des nains, qui sont les peesachs, ou démons familiers de Siva.

En continuant à parcourir le péristyle, on voit sur la face tournée vers l’est un autre tableau, qui fait ainsi face au fond du temple ; il est encore relatif aux luttes qu’eut à subir le culte de Siva pour se substituer aux anciens cultes.

Brahma, voulant peupler la terre, avait enfanté de son pouce droit Danska, qui donna naissance à des nymphes, dont vingt-sept furent consacrées aux divers jours des phases lunaires. Siva épousa l’une d’elles, nommée Sati ou Dourga qui, dans cette hypothèse, se différencie de Parvati. Danska ayant offert un sacrifice suivant les anciens rites, n’invita ni Sita, ni Siva. Sita y vint sans avoir été conviée, fut mal reçue et se jeta de désespoir dans un brasier ardent.

Enflammé de colère, Siva décapita Danska, puis il colla sur ses épaules une tête de cerf. Cet épisode se nomme Vira-Bhadra. Siva est représenté au moment où il fait sauter la tête de Danska dont il reçoit le sang dans une coupe ; ses défenses sortent démesurément de sa bouche, il a une écharpe de crânes humains qui pend de l’épaule gauche à la hanche droite. L’éléphant d’Indra est à droite de Siva ; les dieux l’entourent dans l’attitude de la peur ; au-dessus du groupe planent des enfants adorant un emblème symbolique qui surmonte la tête de Vira-Bhadra. Le gaytri mystique om est gravé sur cet objet qui a la forme d’une gourde ou d’un flacon.

En continuant à marcher vers le nord, on se trouve en face d’un tableau, faisant le pendant de celui où l’on représente Ravan donnant l’assaut au Kaïlassa. Ce relief représente l’incarnation de Siva en Bhairava, forme qu’il prit pour combattre Vishnou changé en Narsinha, homme-lion. Bhairava a huit bras. Ou remarque, parmi les détails qui ornent la sculpture, le croissant et la tête de mort d’où sort un serpent dit cobra capella.

Nous arrivons enfin à l’entrée nord de la grotte, où l’on voit sur la face qui regarde l’est une figure placide assise sur un siége supporté par une tige de lotus, ainsi