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Le uoyage des Princes

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DESSEIN VNZIESME.


Epinoyſe n’y penſant point, ſe laiſſa ſurprendre à l’amour, pour le ſuiect de Caualiree, auquel elle le declare, & il s’en excuſe.



LEs violens efforts d’amour fourniſſoiét d’in uentiös aux amâs à trouuer allegemēt à leurs fantaiſies, & appaiſer leurs douleurs, ou biē leur donnent occaſion de rechercher & auſſi de trouuer les moyens de ſe venger des ſuiects qui les ont irritez, ou contre leſquels ils s’irritent. Epinoiſe la Fee de la Fontaine des amoureux, qui ſi longtemps a veſcu en l’honneur & reputation d’eſtre vnique, ſage, ſans que paſſion aucune ayt eſmeu ſon ame deſraiſonnablement, receut en ce temps cy vn reuers d’amour qui fut cauſe de pluſieurs nouuelles trauerſes, & de nous faire vieillir en nos recherches. L’amour a traicté ceſte Dame, & qui eſt-ce qui eſchappe le traict de ce vif eſprit qui penetre tout ? Où le Soleil peut luire, il paſſe des traicts d’amour, & meſmes il en gliſſe infinis és lieux où lon ne cognoit point la lumiere, & où iamais les eſtincelles du iour n’ont reſplendy, ceſte vigueur a demonſtré ſes effects : Epinoyſe eſtoit aſſez belle pour eſtre deſiree, d’aſſez bon lieu pour eſtre la practique d’vn bel eſprit, & de trop de merites pour n’eſtre point recherchee. Auſſi l’amour auoit par elle fait ſouſpirer en vain tāt d’amās, qui la craignoiét, elle qui