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fortunez. Entreprise I.


ceſte conſideration, & partant ſi vous auez eu quelque opinion ſemblable, ie vous prie la leuer à ceſte heure que ie vous declare les conceptions de mon ame, vous diſant que ie deſire eſtre autant aymee que i’ayme : Et ſi voſtre cœur eſt capable d’amitié, ayez ceſte gloire que ie vous ay prié, ie n’en ſuis point honteuſe, & deſire en cecy diminuer ma reputation, pour m’augmenter en bien d’amour par voſtre courtoiſie ; Penſez donques d’auoir pitié de celle qui vous ſoulageroit, ſi vous la suppliez, qui vous accepteroit, ſi vous ſouſpiriez pour elle, ne fraudez point le deſir de celle qui vous ouure ſon ſecret qui ſera ſecret à iamais, ſi vous ne le deſcouurez trop indignement. Cavaliree. Ma propre miſere me reduit à telle extremité, qu’il faut que ie ſois tant malheureux, que ie ne puiſſe recognoiſtre le bien que vous me faites : Ie vous prie croire que ie ne ſuis ny glorieux, ny deſdaigneux, ny meſcognoiſſant & encor moins ingrat, vous me faites vn hōneur qui ſurpaſſe de trop ma fortune, & ſ’eſleue infiniment au deſſus de mon eſpoir. Si ce bien me fut apparu premierement, ie fuſſe au ſouuerain bon heur, ce qui ne peut eſtre : d’autant que ie ſuis obligé de foy à vne autre, que ie n’oſerois tromper, encor que ie le vouluſſe, pour autant que ie ſuis homme d’honneur, partāt Madame, ſi c’eſt pour ſcauoir mes conceptiōs qu’il vous a pleu ainſi parler à moy, ſoyez contente que ie les vous ay declarees, que ſi veritablement vous me deſirez pour ſeruiteur d’amour, ie vous ſupplie de m’en excuſer : car ie