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Le uoyage des Princes


voſtre reſte, & que ce n’eſt plus ieu, ie laiſſe les ombres de ioyeuſeté à part, ie parle à bon eſcient, & afin que tout d’vn coup ie vous iette aux affaires, dites moy, les artifices des Fortunez ne vo° ſont point encor manifeſtes ? N’auez vo° point apperceu qu’ils vous deçoiuent, & que vous pipans par leurs inuentions, ils vous preparent vne cheute de ſi grande conſequence, que iamais vous ne pourrez vo° en releuer ? Ils vous meinent comme vn lyon enchaiſné, & trafiquås voſtre grandeur vous veulent ruiner d’eſprit & de fortune. l’emp. Que dites vous ? Ceux que vous auez inſinuez en ma grace qui m’ont ſerui tant fidelement, deſquels l’affection m’eſt ſi cognuë : & dont recentemēt les ſeruices paroiſſent, m’ayans conſerué la vie, me la voudroyent-ils rauir ? ceux qui ſont pour le maintien de moy meſme, me voudroyent-ils deffaire ? à la verité, ie ne puis me perſuader qu’ils euſſent en l’ame, autres deſſeins que pour mon bien. la fee. Il eſt permis d’eſtre deceu au commencemét, lors que l’artifice precede la preud’hommie. Et puis les occaſions font ſouuent changer les courages, il y a des eſprits ainſi faits, ils ſ’adonnent à de grands & ſignalez deuoirs, font des ſeruices remarquables pour deceuoir plus facilement, & s’expoſent afin de ne faillir à leurs entrepriſes, ils veulent tout ou rien, & les hazards où ils ſ’auanturent, eſt le grand artifice, par lequel ils aſſeurent leur gibier puis ils frapent leur coup. l’emp. Ma mignonne voudriez vous attribuer telle deſloyauté aux Fortunés qui m’ont tant obligé ? la fee. Ce n’cſt pas tout, qu’ils vous