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fortunez. Entreprise I.

Il n’y a plus moyen que i’aye cognoiſſance
D’autre nō que du voſtre, engraué dans mō cœur,
Auſſi ie ne ſcaurois rendre d’obeiſſance
Qu’a l’vnique beauté dont ie ſuis ſeruiteur.
Voicy le but heureux des belles eſperances,
Dont ie faiſois eſtat pour viure heureuſement,
Voicy le beau deſtin des bonnes influences,
Qui guidoyent mes deſirs au beau contentement.
Que mon cœur ſatisfait ſe prepare de gloire,
A ſeruir dignement voſtre digne beauté,
I’y ſeray tant parfait, que ie vous feray croire
Ma Belle que ie ſuis tout de fidelité.

Que c’eſt vne condition accompaignee de prōptitudes que celle des Amans, qui ſans ceſſe ſont en action, faiſans autant de deſſeins, qu’il ſe paſſe de fantaiſies en leurs opinions, leſquelles ils croyent veritables. Et puis ils tiennent pour certain ce qu’ils imaginent, & comme ils le meditent ils le ſuppoſent : d’auantage ils voudroyent inceſſamment ſe pouuoir manifeſter. S’il eſtoit en la puiſſance des fideles, de faire voir ce qui eſt eſcrit ſur leur cœur, i’ouurirois le miē deuant ma maiſtreſſe, il luy ſera aſſez apparent, quand elle auiſera ce qu’elle ſcait bien, & qu’elle aura la patience d’eſcouter.

Pardonnez ie vous prie à mon impatience
Jugeant de la grandeur de mes affections,
Quād vous m’euſtes reduit, ſous veſtre obeiſsāce,
I’eu le cœur plein de feux, l’ame de paſſions.
Qui pourroit eſtre à vous ſans ſentir les atteintes
Des traits tous enflammez d’vn amour vehemēt ?
Si les flames d’amour eſtoyent toutes eſteintes,
Vos beaux yeux les feroyēt reuiure en vn momēt,