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Le uoyage des Princes


querrer vous maintiendra. Apres ceſte propoſition, il luy declara les inſtitutions & ordonnances legitimes qu’il faut qu’obſerue exactement vn bon Lieutenant, luy parlant en façon tant ſerieuſe, que celà pouuoit induire aiſément vn ieune cœur, qui ne doit point eſtre ſans ambition. Mais ce Prince ſentant en ſoy la reſolution que fournit la ſapience, liſoit és intentions du Roy, auquel il fit ceſte reſponſe. Monſieur, ces aduantages ſortent de voſtre bouche ainſi que de la ſource affluente de bonté, & toutesfois ils me ſont vn torrent qui m’emporte ſi loin, que s’ils continuent, ils me pouſſeront en vn precipice ineuitable, ie vous ſupplie treſ-humblement de me conſeruer en ma petiteſſe, ordonnant ce peſant fardeau à mes freres, qui en ſont capables, & bien que i’aye l’honneur d’eſtre iſſu de vous, ſi ne ſuis-ie encore qu’vn petit ſurjon d’eau viue, ne pouuant ſeulement arrouſer le moindre ſillon d’vn des infinis parterres que la moindre vague de la mer de vos vertus abreuue iournellement. Ce grand Roy trouuant ceſte repartie à ſon gré le renuoya. Par les apparences que le Roy auoit euës que ſes fils auoient acquis de la ſageſſe, ſe ſentit fort ſatisfait en cœur : mais pourtant il eſtima qu’il falloit d’auantage, parquoy ayant plus aduantageuſement conſideré à part ſoy, que ceſte ſimple preuue, où il n’y a que des paroles ſans effets n’eſtoit pas ſuffiſant examen de cœurs parfaits, voulut paſſer outre, afin de contraindre ſes fils à ſe preualoir plus de ſapience & valleur que de grandeurs, & l’ayant meurement remué en ſon ame, les fit tous trois venir parler à luy Et cōme ils eſtoiēt en l’humili-