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fortunez. Entreprise II.


decente, attendant la volonté du Roy, ils’ouyrent de la bouche Royale ceſte reproche & arreſt, Vous eſtes enfans ingrats, preſomptueux & ſans amour, & qui ne pouuez eſtre perſuadez par le deuoir, ie vous ay remonſtré mon inconmmodité, & meſmes priez de me ſoulager en ma vieilleſſe, & vous l’auez refuſé : penſez-vous que ie ne cognoiſſe pas bien voſtre cœur, & que ce n’eſt point humilité ny la biēſeance qui vous a fait parler, & n’accepter les offres que ie vous ay faites, mais vn mauuais ſoin de croupir en eſcoliers pareſſeux, au lieu d’eſtre Princes releués ſelon l’excellente opinion que i’auois de vous ? Parquoy ie vous cōmāde, car ie le veux, & vous enioints treſ-expreſſemēt ſans chercher excuſes en ſorte quelconque, ou pardon, ou grace, ou congé, que vous ayez dés maintenant à vous retirer de ma preſence, & ſortir de mon Royaume, pays & terres de mō obeyſſance, prenant garde ſur vos teſtes d’y eſtre rencontrez : que ſi dix & neuf iours eſtans paſſez on vous y trouue, ie vous feray ſentir les effets de l’ire d’vn Roy iuſtemēt indigné. Ce leur fut vn trait d’extreme douleur, d’entēdre ainſi parler leur Seigneur, leur pere, leur Roy, prononçāt contre leur innocence la plus criminelle iniure de toutes, adiouſtant vn arreſt autant douloureux qu’angoiſſe aucune : toutesfois ayans le cœur muni de patience & de reſolution, qui ſont les principaux fruits de la ſageſſe, ils ne chercherēt autre remede à leur calamité, que d’obeir : donques prenans quelques, commoditez, & ce que leur donna leur ſage ſœur Olocliree, ſe mirent en chemin. Le Roy aduerty de ce prompt depart & ſoudaine obeyfſance,


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