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Le uoyage des Princes


triomphes, qu’elle ſe propoſoit en ma ruine, & iugeant que pour m’abatre du tout, elle me gourmandoit auſſi indignement, qu’elle m’auoit traitté amiablement, i’entray en grande perplexité, Il eſt vray que ie me voulois flatter, pour ne croire point ſon impieté, & ne ſçachant en quoy i’auois erré, i’eſpandois quelques regrets inutiles pour expier ma faute, ie tombois deuant elle en humbles ſupplications, ie lui repreſentois ma fidelité immaculee, & bien que ie continuaſſe à ſupporter les indignitez qu’elle me faiſoit, elle n’en tenoit conte, toutesfois il y auoit quelques heures qu’elle ſembloit eſtre eſmeue de mes ſouſpirs, & m’en fit vne feinte demonſtration à l’autre anniuerſaire, auquel temps ie luy ramentit l’acceptation qu’elle auoit annuellement fait de mon ſeruice, luy teſmoignant comme ie l’auois accouſtumé tous les ans, qu’il n’y auoit qu’elle qui eut pouuoir ſur moy, & luy certifiant ainſi :

L’Aſtre qui renouuelle en ſon cœur les annees
Fait reuenir le temps de mes deuotions,
Ainſi continuant mes bonnes deſtinees
Mon cœur ſe renouuelle en ſes affections.
Quand ie m’offris à vous au grand anniuerſaire,
Il vous pleut accepter mon fidele deuoir,
Ce qui plaiſt vne fois ne doit iamais deſplaire,
Par ces loix vous denez encor me receuoir.
A tel iour qu’auiourd’huy vous me fuſtes propice,
Je vous fis le ſerment de mes fidelitez,
Vos yeux voulurent bien m’arreſter au ſeruice
Qui me fit demeurer deuot à vos beautez,
Belle continuez voſtre humeur agreable,