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Le uoyage des Princes


eſtre suject à la calomnie qui les perſecute, ou aux reproches probables, ie me trace vne belle voye auec la Renommee, en laquelle ſans crainte ou ſoucy des censeurs iniques, ie m’eſgaye en mes precieuses inuentions. Ie ſeray le ſujet & le Heraut de mes geſtes, & sauourant ma vie, ie la dilateray à mon gré en ces beaux proiects, eſquels ie remarqie, voile, ou deſcouure industrieuſement parmy les mignons creſpes de ces deſſeins, ce qu’il y a de recommandable és plaisir d’esprit, recueüillant de quelques ouurages d’autruy ce qu’il falloit ioindre à mes agreables fantaiſies. ainſi meſtant le mien de ce que i’ay glorieusement enleué aux champs par leſquels i’ay passé, ie vay ſuyuant les pointes des occaſions qui m’attirent apres les idees, leſquelles me fourniſſent ces abiſmes de contentements en l’obiect de mes vertueuſes affections, & puis tout nous eſt permis. Et ma Belle ie vous proteſte que

Ce n’eſt point mon deſſein de dire des grandeurs.
Les Princes ny les Rois, ne ſont point ma penſee,
Amour domteur des grāds, monarque de tous cœurs,
D’vne plus belle pointe a mon ame eſlanncee.
Amour veut que raui de vos perfections
Je N’aye que vous ſeule obiet de ma memoire,
Que ie n’aye autre but preſſé de paſſions
Que uous le ſeul ſujet de mon unique gloire.
Les Rois ne me font rien, ie n’ay Rois que vos yeux
Qui ſeuls ſont ſur mon cœur abſolu en puiſſance,
C’eſt icy que ie veux paroiſtre ambitieux,
car ce fuiect est ſeul le ſuiect d’importance.
L’eſperance des Grands ne tend qu’à vanité,
La Fortune s’en ioüe, & le Temps la meſprise.