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Le uoyage des Princes


veritable de ceſte rencontre.) La belle eſtoit à ſa porte qui le voyoit venir, &l’attendoit de bon deſir, & auãt qu’il fuſt venuiuſques à elle ilauint que quelques nymfes de la cognoiſſance de Me liſſe qui auoient paſſé par deuant elle & luya uoient dit bon-ſoir & en haſte, pour retenir cet amant, ce qu’elles firent ſe doutant de leurs a mours, luy qui ne vouloit pas qu’elles creuſſent ce qu’elles penſoient, ſe trouuant arreſté d’elles fit ce qui leur pleuſt, & elles l’emmenerent luy faiſans rebrouſſer chemin : ô cruelles que vous auiez de tort, d’empeſcher ce bel eſprit de voller à ſa vie ! Elles le deſtournerent à la veuë de Me · liſſe qui n’en fut pas contente, & bien qu’elle vouloit aſſez la feinte de ſon ſeruiteur, ſi fut elle depite de cet acte, & en la ſimplicité & iuſtice de ſon amour en fit plainte à ſa ſœur Aſcante, la quelle le lendemain tança doucement Veruille de ſa faute, & de ſi bonne grace en la preſence des autres Nymfes qu’elles ne ſ’en apperceurent point, l’alteration de ſon cœur en cette bleſſure eut eſté manifeſte ſans le iugement dont il vſa à feindre ſa douleur : en ceſte affliction il paſſa quelques heures faſcheuſes, & puis apres plu ſieurs eſlancemens d’eſprit il vint humblement *leuant ſa maiſtreſſe prononcer ceſte requeſte de pardon :

Ma belle ie vous pri ne m’eſtre criminelle,
Ie vous viens humblement confeſſer mon erreur,
Quand vous recognoiſtrez que ie vous ſuis fidele,
Uous n’imputerez point de defaut à mon cœur.
Non ie ne deuoi pas ſuyure vne autre ananture.