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Fortunez. Entreprise III


leſquelles ils croyent, telles que leurs mauuaiſes. humeurs leurs figurent, ainſi en prend-il à ce pauuret, qui deuoit cognoiſtre mon cœur, auant que ſ’addonner au deſeſpoir. Il faut que ie vous confeſſe que ie l’aime, & que iamais il ne partira de mon eſprit, encor que i’aye taſché de l’en effacer à cauſe des dépits que l’vne de nos Nymfes m’en a faict. Auſſi quand il ſaura la verité ie le verray reuenir auec la penitence me ſupplier, ce pendant i’auray du regret pour luy, & le teſmoigneray ou au cœur, ou au viſage. L’Empereur. Donques voſtre eſprit occupé ne donneroit point de lieu à vn autre, & n’y auroit moyen de tirer de vous aucune commodité de cœur par mutuelles affections ? Melis. Les places eſtans priſes, il faut enleuer ceux qui les poſſedent auāt que d’y en mettre d’autres. L’Empr. Quelle grace peut-on donques auoir de vous ? Melisse, Celle qui doit eſtre requiſe. L’Empereur. Que ie ſois trompé ou non, ſi faut-il que ie reçoiue de vous quelque conſolation par le deuis familier, à ce que voſtre bel eſprit me repreſente ce qu’il eſt. Comme il diſoit cecy le retour ſ’acheuoit, & ſe rencontrerent pres la ſeconde ſale de Mercure, où ils entrerent pour ſe repoſer vn petit, ou y eſtre ſelon l’occurrence : & ce que la belle trouueroit d’occaſion propre, à quoy elle pretendoit ; car oyant les autres diſcours de l’Empereur vn peu interrompus (ioinct qu’elle ſçauoit de ſes affaires) pour le diuertir & luy cauſer du relaſche en ſa melancholie, ſe fouuenant d’vne belle hiſtoire, ſ’aui’a de la luy conter, & luy dit : Ie ſçait vne belle auenture