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les mille nuits et une nuit

Mâmoun aimait énormément le gibier, surtout farci de raisins secs et d’amandes. Le repas fini, on apporta un vin étonnant extrait de grappes choisies grain par grain, et cuit avec des fruits parfumés et des noyaux odorants comestibles ; et il fut servi dans des coupes d’or, d’argent et de cristal, par de jeunes garçons comme des lunes, qui étaient vêtus de légères étoffes ondulantes d’Alexandrie, ornées de délicates broderies d’argent et d’or ; et ces jeunes garçons, en même temps qu’ils présentaient les coupes aux convives, les aspergeaient d’eau de roses musquée, au moyen d’aspersoirs d’or enrichis de pierreries.

Le khalifat fut si charmé de tout cela qu’il embrassa son hôte et lui dit : « Par Allah ! ô Ali, désormais je ne t’appellerai plus Ali, mais le Père-de-la-Beauté ! » Et Ali, fils de Hescham, qui fut, en effet, depuis lors surnommé Aboul-Jamal, baisa la main du khalifat, puis fit un signe à son chambellan. Aussitôt un grand rideau se souleva, au fond de la salle, et apparurent dix jeunes chanteuses habillées de soieries noires, et belles comme un parterre de fleurs. Elles s’avancèrent et vinrent s’asseoir sur des sièges d’or que dix esclaves noirs avaient aussitôt rangés en cercle dans la salle. Elles préludèrent par les jeux des instruments à cordes avec une science parfaite, puis chantèrent en chœur une ode d’amour. Alors Al-Mâmoun regarda celle des dix qui l’avait le plus vivement ému et lui demanda : « Comment t’appelles-tu ? » Elle répondit : « Je m’appelle Harmonie, ô émir des Croyants ! » Il dit : « Que tu portes bien ton nom, Harmonie ! Je désire