Page:Leblanc — Contes du soleil et de la pluie, parus dans L’Auto, 1902-1907.djvu/335

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— Quoi ? qu’y a-t-il ? Quelque chose de grave ?

J’hésitais à répondre. Il me supplia d’une voix anxieuse :

— Oh ! je vous en prie, docteur, dites-moi la vérité… ma femme m’est plus chère que tout… Est-ce que vous prévoyez une complication ?

— Non, non, affirmai-je, soyez tranquille.

Il acheva d’enlever le corsage. Je lui saisis le bras et murmurai :

— Je suis le docteur Daurenne.

— Ah ! fit-il abasourdi.

Il regarda ma femme, ou plutôt la sienne, puis me regarda. Je tournai la tête et m’éloignai.

À ce moment elle se plaignit.

— Qu’est-ce que tu as ? s’écria-t-il. Tu souffres ?

Il y eut un silence ; puis, de nouveau, des plaintes. Alors il vint à moi et me dit !

— Docteur, ayez l’obligeance de soigner {Mme Chantelin ; je vous en serais très reconnaissant.

Je m’approchai. Ma femme avait de petites contractions nerveuses. Je prononçai, hésitant :

— Il faudrait… il faudrait que je la…

— Faites tout ce qu’il faut faire, docteur, je vous confie Mme Chantelin.

Il insistait avec une intention visible sur ma qualité de docteur et sur le nom de Mme Chantelin, pour bien établir qu’en tout ceci il ne s’agissait que de soins médicaux donnés à une malade.

Il m’implora de nouveau :

— Je vous en prie, docteur, je vous en prie…

Alors je me penchai sur la malade et l’auscultai.

Je fus tout de suite rassuré : je reconnaissais ce battement Je cœur irrégulier, intermittent, que j’avais eu si souvent l’occasion de constater lorsque ma