Page:Leblanc — Contes du soleil et de la pluie, parus dans L’Auto, 1902-1907.djvu/339

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— Ben quoi ! Monsieur le curé porte aussi des lunettes et des jupes, et il vient sur sa machine pour me donner mes leçons.

Quoique irréfutable, l’argument ne convainquit pas grand’mère.

Mais Jacques avait été si vivement séduit par cette idée de promenades, émise au hasard, qu’il ne cessa de revenir à la charge. Les prières, les raisonnements les plus judicieux sur l’excellence du sport à tout âge, la nécessité pour un petit-fils d’avoir une grand’mère sportive, rien n’ayant prise sur la bonne dame, il employa la ruse.

Tout d’abord elle fut déchue de son rôle de cheval. On ne jouerait plus au cheval.

— Et pourquoi donc, Jacques ?

— Cela m’ennuie.

Et le ballon aussi l’ennuya, et le crocket et le volant, tous les jeux enfin où elle lui servait de partenaire du matin au soir.

Elle fut désespérée. Il ne sortait plus. Pris d’une ardeur subite pour le travail, il apprenait ses leçons et faisait ses devoirs, chose vraiment stupéfiante, et passait ses heures de récréation à lire, étendu sur un fauteuil.

À Ce régime il perdit ses belles couleurs. C’était trop. Grand’mère céda.

Ne voulant pas mettre cher, elle choisit une marque tout à fait inconnue.

La question du costume fut vite résolue : une vieille jupe raccourcie ferait l’affaire.

Et Gravety commença les leçons. Ce qu’elles furent pénibles : Jacques n’en revenait pas.

— Mais enfin, grand’mère, moi, au bout de deux fois, je savais.

— Que veux-tu ? Pas sportive pour deux sous, ta pauvre vieille…

Jacques avait l’impression confuse qu’elle disait vrai, Elle était si drôle là-