Page:Leblanc — Contes du soleil et de la pluie, parus dans L’Auto, 1902-1907.djvu/75

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Et ils allaient, ivres d’épouvante et d’allégresse, pantelants de désir et d’horreur. Ils allaient comme des orages qui s’attirent, comme des planètes désorbitées qui vont s’écraser, s’enflammer dans l’espace, se pulvériser et s’évanouir.

Ils allaient, ils allaient… Et ils se virent distinctement, petites têtes humaines qui dirigeaient des monstres furieux. Et ils entendirent le vacarme des foudres crépitantes…

Et c’était la fin. Quelques mètres encore… Le choc s’annonçait. Le poitrail des monstres se touchait presque… ils allaient se cabrer…

Un tout petit coup de volant à droite, une imperceptible déviation des deux voitures, et ils passèrent l’un près de l’autre, sans se toucher.

J’ai vu tout à l’heure Dermelin et Bradol. Ils sont réconciliés.

Il y a quelque chose de plus fort que la haine, de plus fort que l’orgueil, que la jalousie, que l’amour même : c’est la vie, la vie adorable, unique et précieuse…

Maurice LEBLANC.