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“813”

III

Sur un large balcon de bois, assis devant une table, un jeune homme écrivait.

Parfois il levait la tête et contemplait d’un regard vague l’horizon des coteaux où les arbres, dépouillés par l’automne, laissaient tomber leurs dernières feuilles sur les toits rouges des villas et sur les pelouses des jardins. Puis il recommençait à écrire.

Au bout d’un moment, il prit sa feuille de papier et lut à haute voix :

Nos jours s’en vont à la dérive,
Comme emportés par un courant
Qui les pousse vers une rive
Que l’on n’aborde qu’en mourant.

— Pas mal, fit une voix derrière lui, Mme Amable Tastu n’eût pas fait mieux. Enfin, tout le monde ne peut pas être Lamartine.

— Vous !… Vous !… balbutia le jeune homme avec égarement.

— Mais oui, poète, moi-même, Arsène Lupin qui vient voir son cher ami Pierre Leduc.

Pierre Leduc se mit à trembler, comme grelottant de fièvre. Il dit à voix basse :

— L’heure est venue ?

— Oui, mon excellent Pierre Leduc, l’heure est venue pour toi de quitter ou plutôt d’interrompre la molle existence de poète que tu mènes depuis plusieurs mois aux pieds de Geneviève Ernemont et de Mme Kesselbach, et d’interpréter le rôle que je t’ai réservé dans ma