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lage à Arsène Lupin ; 2° on vit également en Lupin l’auteur de ces trois crimes.

» Je proteste contre ces deux erreurs.

» Votre sagacité, je n’en doute point, a relevé la deuxième : je ne tue pas.

» Mais je tiens aussi à relever : publiquement la première : je ne suis pas l’individu qui a pénétré chez M. Kesselbach. Cet individu, faisant montre d’une indélicatesse que je signale aux honnêtes gens, a usurpé mon nom, s’est servi de mes procédés et m’a compromis par ses maladresses et par la coupable légèreté avec laquelle il a livré au poignard de l’assassin celui qu’il avait eu l’honneur de dépouiller.

» J’en ai rougi de honte.

» Et voilà que, hier soir, chef incapable et que je flétris, il laisse tomber entre, vos mains Jérôme, Marco, la servante de Marco, dévoués collaborateurs qui furent mes compagnons autrefois, et qu’il n’a réunis autour de lui que pour les perdre stupidement.

» Et voilà que lui-même il ose se laisser prendre, sous mon nom, sous le nom d’Arsène Lupin !

» Ceci dépasse les limites. Moi, roulé bêtement, par vous ! Moi pris au piège comme un collégien ! Moi ridiculisé, bafoué, méprisé, détesté, haï !

» Non, mille fois non, je ne puis accepter une pareille chute.

» Je sors donc de la retraite où je vis depuis quatre ans, entre mes livres et mon chien, mon bon chien Sherlock, je bats le rappel de tous mes amis, et je me jette de nouveau dans la mêlée.

» Je le fais avec d’autant plus d’ardeur que l’affaire Kesselbach me semble, à première vue, de tout premier ordre et digne en vérité de mes efforts. Ajouterai-je, monsieur Lenormand, que le plaisir de rompre avec vous quelques lances n’est pas étranger à ma décision ?

» Comme entrée en matière, je commence par m’approprier le sieur Pierre Leduc.

» Et comme d’autre part, il est inconvenant que ceux qui eurent le glorieux privilège de combattre sous ma bannière pourrissent sur la paille de vos prisons, je vous préviens loyalement que je leur pardonne, et que dans cinq semaines, le vendredi 31 mai prochain, je mettrai en liberté le soi-disant Arsène Lupin et mes amis Jérôme, Marco, etc.

» Je vous prie, cher monsieur Lenormand, de m’excuser si je publie cette lettre dans différents journaux et de bien vouloir accepter les hommages de votre respectueusement dévoué


Arsène Lupin. »