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ses biens qui consistaient en une maison de rapport sise à Chartres, rue de la Volasse, numéro 9, et estimée quatre-vingt mille francs.

Je me préparais à partir pour cette ville, quand un individu se présenta chez moi. Il me déclina son nom, M. Gourche, me fournit des quittances attestant qu’il louait cette propriété depuis dix ans, et m’offrit de payer les droits de succession, moyennant quoi j’abaisserais le prix annuel du loyer à huit mille francs.

Confondu, je bégayai :

— Huit mille francs ! Du dix pour cent !

Il me répondit :

— C’est exagéré, n’est-ce pas ? Consentez-vous à une diminution plus forte ?

Je m’empressai de signer tous les papiers et tous les pouvoirs nécessaires. Et désormais, régulièrement, M. Gourche m’apporta lui-même les deux mille francs du terme échu.

Ah ! monsieur, je fus vraiment heureux ! Je ne connus plus l’humble reproche que me lançaient les yeux des mendiants rebutés. En ai-je soulagé des misères et guéri des plaies béantes ! Hélas ! pourquoi Dieu ne m’a-t-il pas laissé dans mon ignorance paisible ?

Une affaire me conduisit à Paris. J’en revins par Chartres, avec l’intention de visiter mon immeuble.

Au sortir du train je demandai le chemin le plus direct pour gagner la rue de la Volasse. La première personne que j’interrogeai me foudroya du regard. La seconde éclata de rire. Je ne compris pas. Enfin un gamin m’amena dans une ruelle obscure et déserte, devant un grand bâtiment d’apparence mystérieuse et il me dit :

— C’est là, le neuf.

Je sonnai. J’entrai.