Page:Leblanc - De minuit à sept heures, paru dans Le Journal, 1931.djvu/89

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— Ils étaient là, continuait le second Russe en désignant la table voisine qu’avaient occupée Nelly-Rose et Gérard. Ils sont arrivés vers deux heures. Ils ont dansé ensemble. Ils se serraient l’un contre l’autre comme des amoureux…

— Et où sont-ils ?…

L’homme fit un geste d’ignorance. Il ne se souciait pas de raconter la rixe, peu glorieuse, ou à cinq ils avaient été tenus en respect par un seul homme.

— Ils sont partis, dit-il seulement. La jeune dame semblait malade, fatiguée. Le grand brun l’a emportée dans ses bras.

— Et puis ?

— Et puis, nous ne savons pas…

— Si, si, vous savez… il faut savoir… il faut vous rappeler, insista Mme Destol, haletante. Rappelez-vous, je le veux.

Un des Russes, maigre, à l’air avisé, moins ivre que les quatre autres, et qui n’avait jusqu’alors rien dit, se rapprocha. Pourquoi ne pas tirer parti de la situation ? Cette dame et son compagnon semblaient bien émus. Sûrement, c’étaient des gens riches. Ils paieraient bien un renseignement. Et puis les renseigner, ce serait aussi se venger de l’homme qui, tout à l’heure, seul contre cinq…

— Eh bien, voilà, dit-il à Mme Destol, on parlerait bien, mais ça peut nous faire des ennuis. Nous sommes de pauvres gens…

— Donnez-lui de l’argent, dit Mme Destol à Valnais.

Valnais sortit cinq cents francs que le Russe empocha.

— Eh bien ! voilà, reprit-il, je les ai suivis de loin… je les ai guettés… Alors, en portant toujours la jeune