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la fortune de m. fouque

ses amis, il restait, malgré ses efforts, sans importance et sans autorité.

Il s’était marié parce que le mariage donne un poids et une teinte sérieuse que n’acquiert point le célibataire. Il espérait ouvrir un salon où il recevrait la société de Caudebec et s’arranger un intérieur où il dominerait. Mais ses invités mangeaient, buvaient, fumaient, sans se soucier de l’hôte qui leur offrait des mets, des vins et des cigares. De même sa femme accaparait la suprématie qu’il avait convoitée.

Mme Fouque, fille d’un mercier d’Yvetot, qui joignait à grand’peine les deux bouts, était une brune, menue, têtue, d’un aspect agréable et d’un caractère hargneux. Il l’avait choisie pauvre pour mériter sa reconnaissance et s’assurer de sa soumission. Mais il se heurta, dès l’abord, à une volonté qui déjoua ses calculs. Elle fit main basse sur les clefs, dirigea les domestiques, commanda les repas, meubla le salon, bouleversa le jardin, agit enfin selon son bon plaisir, sans jamais consulter son mari.

Du moins chercha-t-il le calme, le repos. Là encore il échoua. En rentrant de son bureau, il tombait toujours au milieu de gronderies, et s’il