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la fortune de m. fouque

ler la curiosité des assistants, provoquer le murmure qui applaudit ou le hochement de tête qui désapprouve. Il rêvait des discours, des bons mots, des succès oratoires. Mais, outre qu’il éprouvait à s’exprimer un malaise qui parfois dégénérait en bégaiement, le peu d’attention qu’on lui prêtait le rendait timide et le condamnait au silence.

Alors, renonçant à conquérir l’autorité qu’il méritait, il se rejeta sur les conversations particulières. Il attirait ses amis dans l’embrasure des fenêtres, les agrippait par un bouton de leur jaquette, et, d’un ton larmoyant, les saturait de confidences. Il divulguait les secrets de son ménage, quêtait un conseil, inventait d’interminables histoires. Il déplorait les défauts de sa femme :

— Voyez-vous, Mme Fouque n’a pas de moelleux, nos caractères se choquent, il n’y a pas de jour qu’elle ne me fasse une scène, puis ce sont des bouderies, et des soirées, des nuits s’écoulent sans qu’une parole soit prononcée. Certes elle n’est pas méchante, mais elle se plaît à crier, à disputer, à vociférer. Souvent même elle lève la main.