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L’ÉCLAT D’OBUS

ritoire allemand, sous le prétexte d’une entrevue avec vous. Le Français refusa. La femme l’assassina sous les yeux de son fils. Il s’appelait Delroze. C’était mon père.

Le kaiser avait écouté avec une stupeur croissante. Il sembla à Paul que la teinte de son visage se mêlait de plus de bile encore. Cependant il tint bon sous le regard de Paul. Pour lui, la mort de ce M. Delroze était un de ces incidents minimes auquel un empereur ne s’attarde pas. S’en souvenait-il seulement ?

Refusant donc de s’expliquer sur un crime qu’il n’avait certainement pas ordonné, mais dont son indulgence pour la criminelle le rendait complice, il se contenta, après un silence, de laisser tomber ces mots :

— La comtesse Hermine est responsable de ses actes.

— Et elle n’en est responsable que devant elle-même, remarqua Paul, puisque la justice de son pays n’a pas voulu qu’on lui demandât compte de celui-là.

L’empereur haussa les épaules, en homme qui dédaigne de discourir sur des questions de morale allemande et de politique supérieure. Il consulta sa montre, sonna, prévint que son départ aurait lieu dans quelques minutes, et, se retournant vers Paul :

— Ainsi, dit-il, c’est pour venger la mort de votre père que vous avez enlevé le prince Conrad ?

— Non, sire, cela c’est une affaire entre la comtesse Hermine et moi, mais avec le prince Conrad j’ai autre chose à régler. Lors de son séjour au château d’Ornequin, le prince Conrad a poursuivi de ses assiduités une jeune femme