Page:Leblanc - L’Île aux trente cercueils.djvu/250

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« Trente ! nombre fatidique ! Comment ne pas voir là un appel et un ordre des divinités mystérieuses ? Les trentes barques furent remises à flot et l’expédition commença. »

« Elle réussit. On prit l’île d’assaut. On extermina purement et simplement les indigènes. La tribu s’installa, et la pierre tombale du roi de Bohème fut mise en place… à l’endroit même qu’elle occupe aujourd’hui et que j’ai fait voir au camarade Vorski. Ici, une petite parenthèse et quelques considérations historiques de la plus haute portée. Ce sera bref. »

D’un ton de professeur, don Luis expliqua :

« L’île de Sarek, de même que toute la France et que la partie occidentale de l’Europe, était habitée depuis des milliers d’années par ceux qu’on appelle les Ligures, descendants immédiats des hommes des cavernes dont ils avaient conservé en partie les mœurs et les habitudes. Puissants constructeurs, cependant, que ces Ligures, qui, aux époques de la pierre polie, et subissant peut-être l’influence des grandes civilisations de l’Orient, avaient dressé leurs formidables blocs de granit et bâti leurs colossales chambres funéraires.

« Ce fut là ce que trouva notre tribu et dont elle s’accommoda si bien, un système de cavernes et de grottes naturelles, aménagées par la main patiente de l’homme, et un groupe de monuments énormes qui frappaient les imaginations mystiques et superstitieuses des Celtes.

« Ainsi donc, après la première phase, celle des pérégrinations, s’ouvre, pour la Pierre-Dieu, la période de repos et de culte que nous appellerons la période druidique. Elle dura de mille à quinze cents ans. La tribu se fondit dans les tribus voisines et vécut probablement sous la tutelle de quelque roi breton. Mais, peu à peu, l’influence avait passé des chefs aux prêtres, et ces prêtres, c’est-à-dire les Druides, prenaient une autorité qui s’accentua au cours des générations suivantes.

« J’affirme que, cette autorité leur vint de la pierre miraculeuse. Certes, ils étaient les prêtres d’une religion reconnue par tous, et les éducateurs de la jeunesse gauloise (nul doute, entre nous, que les cellules des Landes--