Page:Leblanc - La Femme aux deux sourires, paru dans Le Journal, 1932.djvu/125

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L’inspecteur sourit.

— Je vois, monsieur le marquis, que vous comptiez sur une autre visite que la mienne, et que vous seriez désireux d’y mettre obstacle. Peut-être est-il trop tard.

— Je suis dans un état d’esprit, monsieur, fit Jean d’Erlemont, où tous les visiteurs me paraissent des intrus.

— À commencer par moi.

— À commencer par vous. Aussi finissons-en rapidement, et veuillez me suivre dans mon bureau.

Il s’en revint à travers la cour, jusqu’au château, accompagné d’Antonine et de l’inspecteur.

Mais, comme ils débouchaient à l’angle, ils avisèrent un monsieur qui était assis sur le banc de la terrasse, et qui fumait une cigarette.

La stupeur du marquis et d’Antonine fut telle qu’ils s’arrêtèrent.

Gorgeret s’arrêta comme eux, mais très calme, lui. Connaissait-il la présence de Raoul dans l’enceinte des murs ?

Raoul, en les apercevant, jeta sa cigarette, se leva, et dit joyeusement au marquis :

— Je vous ferai remarquer, monsieur, que le rendez-vous était sur le banc. Au dernier coup de quatre heures, je m’y asseyais.

Très élégant dans son complet de voyage clair, la taille bien prise, la figure amusée, vraiment sympathique, il avait enlevé son chapeau, et s’inclinait profondément devant Antonine.

— Je m’excuse encore, mademoiselle. Je porte une lourde part des tourments que vous avez dû subir, grâce à quelques malotrus. J’espère que vous ne m’en tiendrez pas rigueur puisque l’intérêt du marquis d’Erlemont guida seul ma conduite.

De Gorgeret, il ne fut pas question. On eût dit que Raoul ne l’avait pas vu et que la silhouette massive de l’inspecteur demeurait invisible pour lui.

Gorgeret ne broncha pas. Lui