Page:Leblanc - La Femme aux deux sourires, paru dans Le Journal, 1932.djvu/129

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tait ce jour-là vous appartenaient sans exception ?

— Non. Il y avait en outre un rang de perles fines que je lui avais données, d’ores et déjà, en toute propriété et d’une très grande valeur.

— Que vous lui avez offertes de la main à la main ?

— Que je lui ai fait envoyer par un bijoutier.

Raoul hocha la tête.

— Vous voyez, monsieur, à quel point Valthex a pu prendre barre sur vous. Que Valthex ait recueilli un document prouvant que ce rang de perles appartenait à sa tante, de quel poids serait un tel document !

Et Raoul ajouta :

— Il ne s’agit plus, maintenant, que de découvrir le collier de perles et les autres colliers. Quelques mots encore. Le jour du drame, vous avez conduit Élisabeth Hornain jusqu’en bas des pentes qui montent aux ruines ?

— Un peu plus haut même.

— Oui, jusqu’à l’allée horizontale d’aucubas que l’on aperçoit d’ici ?

— En effet.

— Et vous êtes restés invisibles tous deux durant un espace de temps plus long que l’espace de temps que l’on pouvait escompter ?

— En effet. Je n’avais pas eu l’occasion de voir Élisabeth seule depuis deux semaines et nous nous sommes longuement embrassés.

— Ensuite ?

— Ensuite, comme elle avait l’intention de chanter certains morceaux où il lui semblait que son habillement et sa mise devaient rester parfaitement simples, elle voulut me confier tous ses colliers. Je ne fus pas de son avis. Élisabeth n’insista pas et elle me regarda partir. Quand je tournai à l’extrémité de l’avenue des aucubas, elle était encore immobile.

— Avait-elle encore les colliers quand elle arriva à la terrasse supérieure des ruines ?

— Je n’en sais rien, personnellement. Et c’est un point sur lequel aucun des invités ne put faire une déclaration précise. On ne remarqua l’absence des colliers qu’après le drame.

— Soit. Mais le dossier de Valthex contient des témoignages contraires. Au moment du drame, Élisabeth Hornain n’avait plus les bijoux.

Le marquis conclut :

— Ils auraient donc été volés entre l’avenue des aucubas et la terrasse supérieure ?

Il y eut un silence, et Raoul articula lentement, syllabe par syllabe :

— Les bijoux n’ont pas été volés.

— Comment, ils n’ont pas été volés ! Mais pourquoi Élisabeth Hornain aurait-elle été assassinée ?

— Élisabeth Hornain n’a pas été assassinée.

C’était la joie de Raoul de procéder ainsi par affirmations sensationnelles. Et cette joie se voyait à une petite flamme qui s’allumait dans ses yeux.