Page:Leblanc - La Peur du vertige, paru dans Candide, 1925.djvu/17

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qui me grisait déjà quand j’étais petite fille. Soudain vous avez saisi ma main. Pourquoi si brusquement ? Je n’aurais pas eu plus de force pour résister à de la douceur. Et puis savais-je qu’il y a des choses auxquelles il faut résister ? Savais-je qu’il y a des embûches, des attaques sournoises, et qu’on doit et qu’on peut se défendre ? Hélas ! j’ignorais le mal, et vous en avez profité. Et de même que je m’étais abandonnée, devant les autres, à la joie de vous entendre et de vous regarder, je me suis abandonnée à vos caresses sans comprendre, sans savoir, entraînée par un vertige affreux qui faisait tout à coup de moi une femme différente… une femme qui ne m’obéissait plus…

« Elle courba la tête. Je voyais sa nuque brune et un peu de ses épaules pleines. Nous demeurions immobiles l’un près de l’autre. Le rôle odieux de Déjancourt m’apparaissait maintenant. Ayant remarqué l’attention qu’elle me portait, la crise que subissait en face de nous son âme ingénue de provinciale, il avait joué sous mon nom la comédie la plus vilaine et commis un acte impardonnable. J’allais me disculper et raconter la machination, lorsqu’elle ajouta ces quelques mots :