Page:Leblanc - La Peur du vertige, paru dans Candide, 1925.djvu/22

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quement et moralement, et il a sa propre personnalité, charmante et enjouée. De lui à moi d’ailleurs, pas une allusion à ce qui nous unissait, et l’entente fut si agréable qu’un second rendez-vous suivit, et un troisième. Mais, à ce moment, déjà, je me rendais compte qu’une autre cause de silence s’ajoutait à celles qui m’avaient interdit toute révélation, une cause plus profonde, dont j’avais subi l’influence à mon insu, la première fois. Ai-je besoin de la dire ?

Gassereaux, bien que le récit de son ami l’eût vivement impressionné, plaisanta :

— Le coup de foudre…

Vérange vint s’asseoir auprès de lui et, d’une voix de confidence, qui marquait l’effort de sa réflexion :

— Non, dit-il. Le coup de foudre, c’est l’invasion d’un sentiment, d’un désir. Moi, ce qui m’a envahi peu à peu, c’est moins théâtral et plus complexe. Ce fut… comment t’expliquer ? Ce fut le souvenir involontaire de ce qui ne s’était pas passé. Tu comprends ? Le soir, à Guérande, dans le jardin obscur, il n’y a rien eu, n’est-ce pas ? entre Marceline et moi. Mais Marceline croit que je fus son amant. Et tout de suite, cette idée m’a troublé. Le lien qui,