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— Inutile de te dire que tout ça m’a quelque peu fatigué et qu’un petit somme me paraît de rigueur. Veille sur mes rêves, mon bon Rodolphe, et ne t’inquiète pas. Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes. Chacun y occupe la place qu’il mérite, et les gourdes servent d’oreiller aux malins de mon espèce.

Il s’endormit.

Le soir venait. De l’ombre tombait autour d’eux. Parfois Raoul s’éveillait et prononçait quelques paroles sur les étoiles scintillantes ou sur la clarté bleue de la lune. Puis, de nouveau, c’était le sommeil.

Vers minuit, il eut faim. Sa valise contenait des aliments. Il en offrit à Marescal et lui ôta son bâillon.

— Mange, mon cher ami, dit-il, en lui mettant du fromage dans la bouche.

Mais Marescal entra aussitôt en fureur et recracha le fromage en baragouinant :

— Imbécile ! crétin ! C’est toi la gourde ! Sais-tu ce que tu as fait ?

— Parbleu ! j’ai sauvé Aurélie. Son beau-père la ramène à Paris, et moi, je l’y rejoins.

— Son beau-père ! Son beau-père ! s’écria Marescal. Tu ne sais donc pas ?

— Quoi ?

— Mais il l’aime, son beau-père !

Raoul le saisit à la gorge, hors de lui.

— Imbécile ! Crétin ! Tu ne pouvais pas le dire, au lieu d’écouter mes discours stupides ? Il l’aime ? Ah ! le misérable… Mais tout le monde l’aime donc, cette gosse-là ! Tas de brutes ! Vous ne vous êtes