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« Pourtant, se dit Mazeroux, s’il a téléphoné, ce ne peut être que d’ici. »

En effet, il constata, de loin, que le récepteur était décroché, et, s’étant avancé vers la cabine, il heurta des morceaux de briques et de plâtre qui jonchaient le tapis. Alors, il fit aussi la lumière dans cette cabine, et il aperçut au-dessus de lui un bras qui pendait du plafond. Tout autour de ce bras, le plafond était éventré. Cependant, l’épaule n’avait pu passer et on ne discernait pas la tête du captif.

Mazeroux sauta sur une chaise et atteignit la main qu’il palpa, et dont le tiède contact le rassura.

— C’est toi, Mazeroux ? articula une voix, qui parut très lointaine au brigadier.

— Oui, c’est moi-même. Vous n’êtes pas blessé, hein ? Rien de grave ?

— Non, étourdi seulement… et assez faiblard… La faim… Écoute-moi…

— J’écoute…

— Ouvre le second tiroir de gauche de mon bureau. Tu trouveras…

— Quoi, patron ?

— Un vieux bout de chocolat.

— Mais…

— Va toujours, Alexandre, j’ai une sacrée faim.

De fait, après un instant, don Luis reprit, d’un ton plus gaillard :

— Ça va mieux. Je puis attendre. Cours à la cuisine et rapporte-moi du pain et de l’eau.

— Je reviens, patron.

— Pas directement. Reviens par la chambre de Florence Levasseur et par le passage secret jusqu’à l’échelle qui mène à la trappe supérieure.

Et il lui indiqua le moyen de faire basculer la pierre et de s’introduire dans la sorte de canal où il avait cru trouver une fin si tragique.

En dix minutes, ce fut chose exécutée. Mazeroux déblayait l’orifice, parvenait à saisir don Luis par les jambes et le tirait hors de sa tanière.

— Eh bien, vrai, patron, gémissait-il tout apitoyé, en voilà une position ! Comment avez-vous fait votre compte ? Oui, je vois ça d’ici, vous avez creusé devant vous, à plat ventre, et creusé encore… plus d’un mètre ! Il vous en a fallu du courage, avec un estomac vide !