Page:Leblanc - Les Dents du Tigre, paru dans Le Journal, du 31 août au 30 octobre 1920.djvu/332

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Tout en rampant, attentif aux moindres mouvements de don Luis, il vint s’accroupir à côté du puits. Son bras tendu braquait le revolver. Et son rire infernal jaillit de nouveau :

« Lupin ! Lupin ! Lupin ! Ça y est ! le plongeon de Lupin ! Ah ! faut-il que tu en aies une couche ! Je t’avais prévenu cependant, prévenu à l’encre de sang. Rappelle-toi… « L’emplacement de ta mort est déjà choisi. Le piège est prêt. Prends garde, Lupin. » Et te voilà ! Tu n’es donc pas en prison ? Tu as encore paré ce coup-là ? Coquin, va… Heureusement que j’avais prévu l’aventure et pris mes précautions. Hein ? Ça y est-il, comme combinaison ? Je me suis dit : « Toute la police va galoper sur mes trousses. Mais il n’y en a qu’un qui soit de taille à me rattraper, un seul, Lupin. Donc, montrons-lui la route, conduisons-le comme à la laisse tout du long d’un petit chemin ratissé par le corps de la victime… » Et alors, des points de repaire, semés habilement çà et là… Ici la bague de la donzelle entortillée d’un brin d’herbe, plus loin une fleur déchiquetée, plus loin l’empreinte de cinq doigts enfoncés, ensuite le signe de la croix… Pas moyen de se tromper, hein ? Du moment que tu me jugeais assez stupide pour laisser à Florence le loisir de jouer au Petit Poucet, ça te menait tout droit dans la gueule du puits, sur les mottes de gazon que j’ai plaquées dessus, le mois dernier, en prévision de l’aubaine… Rappelle-toi… le piège est prêt… Et un piège à ma façon, Lupin, du meilleur cru. Ah ! c’est que mon plaisir est de me débarrasser des gens avec leur concours et leur bonne volonté. On collabore comme de bons camarades. Tu as déjà saisi la chose, hein ? Je n’opère pas moi-même. C’est eux qui s’opèrent, qui se pendent ou se fichent de mauvaises piqûres… à moins qu’ils ne préfèrent la gueule d’un puits, comme toi, Arsène Lupin ! Ah ! mon pauvre vieux, dans quelle mélasse t’es-tu fourré ? Non, mais