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HÉLÈNE.

De sa jeune fierté l’irrésistible grâce
À mes regards encore en songe se retrace…
Je l’aime !… Éros ! voilà de tes funestes jeux !…
Dis-moi que mon époux est sage et courageux,
Vieillard, et que sans doute, en mon âme abusée,
Un sombre rêve a mis cette image insensée ;
Dis-moi qu’Atride m’aime et qu’en ce dur moment
Il brave la tempête et le flot écumant,
Qu’il m’a commis l’honneur de sa vie héroïque,
Que je l’aime !… Ô douleur ! ô race fatidique
D’Atrée ! ô noir destin, et déplorable jour !
Flammes qui consumez mon cœur, ô lâche amour !
C’est en vain que sa vue à mes yeux est ravie,
Il emporte la gloire et la paix de ma vie !


DÉMODOCE.


Noble Hélène, les Dieux, d’où naissent nos travaux,
Aux forces de nos cœurs ont mesuré nos maux,
Et dans les parts qu’ils font des fortunes diverses
Ils livrent les meilleurs aux plus rudes traverses,
Certains que tout mortel armé de sa vertu
Sous le plus lourd destin n’est jamais abattu…
Rejetez loin de vous, murs belliqueux de Sparte,
L’hôte qui vous outrage. Ô Zeus, Pallas ! qu’il parte !
Et que les jours futurs dévoilés à mes yeux
S’effacent comme l’ombre à la clarté des cieux !


HÈLÈNE.


Toi que les Dieux ont fait confident de leur haine,
De quels funestes coups frapperont-ils Hélène ?