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POÈMES ANTIQUES.

Viens ! Que toujours ta flèche, à ton regard fidèle,
Atteigne aux cieux l’oiseau qui fuit à tire d’aile ;
Que jamais dans sa rage un hardi sanglier
Ne baigne de ton sang les ronces du hallier !
Compagnon d’Artémis, invincible comme elle,
Viens illustrer ton nom d’une gloire immortelle ! —

Et je dis : — Ô Déesse intrépide des bois,
Qui te plais aux soupirs des cerfs, aux longs abois
Des lévriers lancés sur la trace odorante ;
Vierge au cœur implacable, et qui, toujours errante,
Tantôt pousses des cris féroces, l’arc en main,
L’oeil brillant, et tantôt, au détour du chemin,
Sous les rameaux touffus et les branches fleuries,
Entrelaces le chœur de tes Nymphes chéries,
Artémis ! je suivrai tes pas toujours changeants,
J’atteindrai pour te plaire, en mes bonds diligents,
Les biches aux pieds prompts et les taureaux sauvages
Qui troublent, mugissants, les bois et les rivages,
Si tu daignes, Déesse, accorder à mes vœux
La blanche Kharikhlô, la Nymphe aux blonds cheveux,
Qui s’élève, au milieu de ses sœurs effacées,
Comme un peuplier vert aux cimes élancées ! —

La Déesse sourit ; et, chasseur courageux,
Depuis dans les forêts je partageai ses jeux.
Mais quand, pour d’autres bords, la Vierge Latoïde,
Lasse de la vallée ou de la cime aride,
De ses Nymphes suivie, à l’horizon des flots