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LES ÉRINNYES.

TALTHYBIOS.

Femme du Chef absent, reine Klytaimnestra,
Qui commandes la sainte Argos chère aux Daimones,
Certes, nous l’avouons, tes paroles sont bonnes,
Mais l’Espérance est jeune, et nous sommes très vieux !


EURYBATÈS.

L’ineffable avenir est dans la main des Dieux.
Souvent l’essaim léger des visions joyeuses
Illumine la paix des nuits silencieuses.
Crains l’aube inévitable, ô Reine, et le réveil !


KLYTAIMNESTRA.

Suis-je un enfant qui pleure ou rit dans le sommeil ?
Soit ! Il suffit : j’ai vu pour vos vieilles prunelles.
Chantez aux Bienheureux les hymnes solennelles,
Car la flamme infaillible a parlé hautement,
Et les nefs ont fendu Poseidôn écumant,
Et l’éperon d’airain s’enfonce dans le sable.
Il approche, le Chef sacré, l’irréprochable
Porte-sceptre, à qui Zeus accorde le retour,
Mais non pas, ô vieillards, de voir, vivante au jour,
Cette jeune victime aisément égorgée
Dont le sang pur coula pour qu’Hellas fût vengée,
Cette première fleur éclose sous mes yeux
Comme un gage adoré de la bonté des Dieux,
Et que, dans le transport de ma joie infinie,
Mes lèvres et mon cœur nommaient Iphigénie !
Ce qui dut être fait est fait. C’est bien. L’oubli