Page:Leconte de Lisle - Discours, 1887.djvu/57

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c’est justement la seule qu’il ne se procure presque jamais. 12 mort a du bon ; mais l’homme lui préférera toujours la vie, pour commencer. Ace point que l’espérance que nous avons d’être éternels dans un autre monde n’est peut-être faite, pour beaucoup, que du désespoir de ne pas l’être dans celui-ci. Toutes nos doléances, à ce sujet, aboutissent finalement à la fable de la Mort et du Bûcheron, du bonhomme la Fontaine, philosophe pour enfants, qui a fait dire aux bêtes tant de choses raisonnables, à qui nos mères nous mènent de force quand nous sommes petits, à qui nous revenons tout seuls quand nous sommes vieux, dont la philosophie est peut-être la seule qui soit à la mesure de l’homme et à laquelle il me semble que vous commencez vous-même à faire retour. Et la preuve, c’est que nous vous voyons là, vivant, bien vivant, grâce à Dieu, et même immortel, immortel comme nous le sommes tous ici ; je ne vous garantis pas davantage. Durant cette immortalité mutuelle, nous nous efforcerons de vous faire aimer la vie, pour que vous puissiez écrire longtemps encore de beaux vers sur la mort. Et vous verrez que cette vie a quelques bons moments, comme celui-ci par exemple, où j’éprouve une véritable joie, je vous assure, à honorer publiquement, tout en le contredisant un peu, un homme d’un grand talent et d’un beau caractère.

Quand j’ai su que je devais avoir l’honneur de vous répondre, Monsieur, j’ai attendu avec impatience, la communication de votre discours. Il me semblait