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LE MASSACRE DE MONA.

Et la foule agitant les haches, les penn-baz
Et les glaives, ainsi qu’à l’heure des combats,
Ivre du souvenir et toute hérissée,
Salua les splendeurs de sa gloire passée.
Et les Dieux se levaient, tordant au fond des cieux
Leurs bras géants, avec des flammes dans les yeux,
Et, tels qu’une forêt aux immenses feuillages,
De leurs cheveux épars balayant les nuages.
La foudre, d’un soleil sanglant, illumina
L’horizon et la mer, et la sainte Mona
Qui bondit hors des flots, flamboyante et frappée
Et d’un rugissement terrible enveloppée,
Tandis que le rideau de la nuit se fendait
Du haut en bas sous l’ongle en feu qui le mordait,
Laissant pendre, enlacés de palpitantes flammes,
Des lambeaux convulsifs sur la crête des lames.
Puis dans l’obscurité tout rentra brusquement ;
La mer, fumante encor, reprit son hurlement
Monotone, le long des rochers et des sables ;
Et tous les fils de Math se rassirent, semblables
À ces amas de blocs athlétiques et lourds,
Immobiles depuis l’origine des jours,
Qui regardent, penchés sur les abîmes vagues,
À l’assaut des grands caps monter les hautes vagues.
Alors, Uheldéda, roidissant ses bras blancs,
Éleva vers le ciel ses yeux étincelants ;
Et la foule écouta la Vierge vénérée
Qui tranche le Gui vert sur l’écorce sacrée,
Et qui, du haut des rocs battus du flot amer,