Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/412

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Noire œil, au froncement du cristal tourmenté,
Mesure la tempête et son vol arrêté :
Elle existe ; et pourtant, sous le froid de ses voiles,
L’onde, comme en été, berce encor les étoiles.
Ne revenez donc plus, tournant la vérité,
Vous poser en mystère à ma sagacité.
L’homme, en les devinant, des énigmes se venge :
Dieu se fait excepter mais vous n’êtes qu’un ange.
Voulez-vous maintenant qu’aux lueurs de mon art,
Je ramène vos pas à leur point de départ ?
Voulez-vous qu’à travers la brume des années,
Je retrouve les fleurs que vous avez glanées :
Ou que, de vos pcnsers ressuscitant le cours,
J’en déroule à vos yeux la carte et les détours’?
Faut-il vous retracer, Maria, vos chimères :
Comment do l’avenir les rêves éphémères
Ont, usurpant d’abord votre jeune raison,
Des fictions du cœur peuplé votre horizon,
Et comment aujourd’hui vous les laissez encore
Suspendre, à votre ciel, leur flottant météore ?
Chaque songe, pour vous, qui l’aviez inventé,
Est devenu plus vrai que la réalité ;
Et, de vos jours ainsi recomposant le livre,
Vous avez peu vécu, mais vous avez cru vivre :
Vous n’avez point souffert d’un malheur éprouvé :
Vous souffrez d’un bonheur, qui n’est pas arrivé.,