Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/561

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Où recourir alors : où chercher assistance :
Et comment, sans l’éteindre, étouffer l’existence ?
Lorsque, de Raphaël outrageant les pinceaux,
La dent sourde des ans ronge, sous ses tableaux,
Les canevas vieillis, où respire un beau rêve,
De ce chanvre élimé notre adresse l’enlève,
Et, sur des fils nouveaux transportant la couleur,
Du dessin rajeuni ressuscite la fleur ;
Mais nous, lorsque le temps embrume nos pensées,
Dégrade leurs contours, et, de ses mains glacées,
Efface dans nos cœurs ces tableaux palpitants,
Ces songes embaumés, qu’y grava le printemps,
(Plus purs peut-être encor que l’air de ces prairies,
Dont la main du Poussin crayonna les féeries,)
Quel art peut ranimer ces vagues arcs-en-ciel,
Et de nos jours dorés l’or superficiel ?
Aucun ne peut les rendre à notre âme ravie :
On ne peut pas changer la toile de la vie :
Tout s’éteint pour toujours sous nos astres fiévreux.
Las ! je fus peintre aussi, lorsque j’étais heureux :
J’égalais du Lorrain les plus riches ouvrages :
O nuit ! qu’avez-vous fait de mes beaux paysages ?

Jeune, je croyais voir, aux mains de l’avenir,
Mon écusson d’azur briller, sans se ternir.