Page:Lefranc - Hélène de Tournon. Celle qui mourut d'amour et l'Ophélie d'Hamlet, 1926.pdf/27

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et morose, et c’est pourquoi elle mourut ; mais si elle avait été légère comme vous, si elle avait eu votre esprit gai, preste, pétulant, elle aurait pu devenir grand mère avant de mourir, et c’est ce que vous deviendrez, car un cœur léger vit longtemps.

Rosaline.Quel sens sévère, petite souris, cachez-vous sous ce mot léger ?

Catherine.Je veux dire que vous enfermez une âme légère sous une beauté sévère.


Examinons à présent l’allusion singulière dont Celle qui mourut d’amour est ici l’objet. Aucune hésitation ne saurait exister au sujet de la signification de ce texte : il doit s’appliquer à une aventure réelle. Nous sommes à la cour de Navarre : ce sont les dames d’honneur de la princesse de France, c’est-à-dire de Marguerite de Valois, comme nous l’avons démontré, qui devisent entre elles et évoquent un souvenir certainement vécu, et tout à fait contemporain, lequel s’applique à la sœur de l’une d’entre elles. Le groupe est apparemment familier avec cette histoire, puisqu’il suffit de l’évoquer en quelques mots, sans nommer celle qui en fut l’héroïne, pour que chacune des dames de l’entourage de la reine de Navarre sache à qui se rapporte le propos. Nous venons de constater que les deux voyages qui précédèrent celui qui fait le sujet de la pièce ont été évoqués un peu plus haut avec une grande précision. Les divers éléments étudiés jusqu’ici sont donc concrets et réels. Puisque nous tenons en main un fil conducteur, rien ne paraît plus naturel que de rechercher si, parmi les événements qui se

25