Page:Leibniz - Discours de métaphysique, éd. Lestienne, 1907.djvu/89

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des uns se rencontrent et s’accordent avec ceux des autres, et par conséquent qu’il y a de la réalité dans nos perceptions. Mais dans la pratique on attribue l’action aux raisons particulières dans le sens que j’ai expliqué ci-dessus, parce qu’il n’est pas nécessaire de faire toujours mention de la cause universelle dans les cas particuliers. On voit aussi que toute substance a une parfaite spontanéité (qui devient liberté dans les substances intelligentes), que tout ce qui lui arrive est une suite de son idée ou de son être et que rien ne la détermine excepté Dieu seul. Et c’est pour cela qu’une personne dont l’esprit était fort relevé et dont la sainteté est fort révérée, avait coutume de dire, que l’âme doit souvent penser comme s’il n’y avait que Dieu et elle au monde. Or, rien ne fait comprendre plus fortement l’immortalité que cette indépendance et cette étendue de l’âme qui la met absolument à couvert de toutes les choses extérieures, puisqu’elle seule fait tout son monde et se suffit avec Dieu : et il est aussi impossible qu’elle périsse sans annihilation, qu’il est impossible que le monde (dont elle est une expression vivante, perpétuelle) se détruise lui-même ; aussi n’est-il pas possible que les changements de cette masse étendue qui est appelée notre corps, fassent rien sur l’âme, ni que la dissipation de ce corps détruise ce qui est indivisible.

33. ‑ Explication de l’union de l’âme et du corps qui a passé pour inexplicable ou pour miraculeuse, et de l’origine des perceptions confuses.