Page:Lemaître - Chateaubriand, 1912.djvu/183

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désespérée et ravie. Elle avait cru qu’elle m’était à charge, et elle avait désiré s’en aller pour me débarrasser d’elle. »

Pauvre petite femme ! Madame de Beaumont ne se trompait peut-être pas complètement. Chateaubriand non plus, qui certainement aima cette amie à son lit de mort. Il lui fit faire, à Saint-Louis-des-Français, un tombeau qui coûta 9.000 francs, et pour lequel il s’endetta. Un peu auparavant, pour soigner madame de Beaumont, il avait voulu emprunter de l’argent à sa nouvelle amie madame de Custine, qui refusa, ne voyant dans madame de Beaumont qu’une rivale. Il en fut très étonné. Oh ! c’était, comme dit Joubert, un « bon garçon ».

À sa dernière heure, madame de Beaumont l’avait « engagé à vivre auprès de madame de Chateaubriand ». Il l’avait revue deux fois : à Paris en revenant de Londres : puis en Bretagne, pendant vingt-quatre heures, après son tour de France. Sans doute il lui avait fait comprendre qu’il la rendrait malheureuse sans le vouloir ; que d’ailleurs le restaurateur du culte avait des privilèges, et que, d’ailleurs, après dix ans de séparation, ce n’était vraiment plus la peine. Enfin, sur le suprême conseil de sa maîtresse, il reprit sa femme. Madame de Beaumont avait-elle su ce qu’elle faisait ? Madame de Chateaubriand admirait fort son mari, mais sans l’avoir lu (c’est lui qui nous l’apprend). Elle était profondément pieuse auprès de ce chrétien d’attitude.