Page:Lemaître - Les Contemporains, sér3, 1898.djvu/326

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exemple, relisez, je vous prie, la première page de Miarka :

… C’est qu’il faut profiter vite des belles journées au pays de Thiérache… Un coup de vent soufflant du Nord, une tournasse de pluie arrivant des Ardennes, et les buriots de blé ont bientôt fait de verser, la paille en l’air fit le grain pourri dans la glèbe. Aussi, quand le ciel bleu permet de rentrer la moisson bien sèche, tout le monde quitte la ferme et s’égaille à la besogne. Les vieux, les jeunes, jusqu’aux infirmes et aux bancroches, tout le monde s’y met et personne n’est de trop. Il y a de la peine à prendre et des services à rendre pour quiconque est à peu près valide. Tandis que les hommes et les commères ahannent au rude labeur, les petits et les marmiteux sont utiles pour les œuvres d’aide, étirer les liens des gerbes, râteler les javelles éparses, ramoyer les pannes cassées par la corne des fourches ou simplement émoucher les chevaux, dont le ventre frissonne et saigne à la piqûre des taons et dont l’œil est cerclé de bestioles vrombissantes.

Assurément ce style est savoureux, mais trop chargé, trop savant et, peu s’en faut, pédant. M. Richepin croit mieux peindre en n’employant que des mots aussi familiers et particuliers que possible. Mais ces mots, il semble qu’il les cherche et les accumule avec trop de peine à la fois et de satisfaction ; et l’impression directe des choses s’évanouit dans ce labeur de grammairien. Puis, ces mots qui nous tirent l’œil nous empêchent de voir le tableau. Ce ne sont ni les vocables curieux ni les expressions outrées qui