Page:Lemaître - Les Contemporains, sér4, 1897.djvu/201

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« M. Taine est un entomologiste ; la nature l’avait créé pour classer et décrire des collections épinglées. Son goût pour ce genre d’étude l’obsède ; pour lui, la Révolution française n’est que la « métamorphose d’un insecte ». Il voit toute chose avec un œil de myope, il travaille à la loupe, et son regard se voile ou se trouble dès que l’objet examiné atteint quelques proportions. Alors il redouble ses investigations ; il cherche un endroit où puisse s’appliquer son microscope ; il trouve une explication qui rabaisse, à la portée de sa vue, la grandeur dont l’aspect l’avait d’abord offusqué, etc. »

Rien de plus faux, à mon sens, que ce jugement. Le prince Napoléon est évidemment dupe des apparences. Il est même dupe des mots. De ce que M. Taine compare la Révolution à une métamorphose d’insecte, il conclut que M. Taine n’est en effet qu’un entomologiste, un myope, uniquement attentif aux petites choses, comme si, au contraire, cette comparaison n’impliquait pas une vue très générale sur l’histoire de la Révolution. Des petits faits entassés par M. Taine dans presque tous ses ouvrages, le prince ne voit que le nombre, il ne voit pas la puissance avec laquelle ils sont enchaînés et classés, — et qu’ils ne sont là que pour préparer et appuyer les généralisations les plus hardies. C’est une fantaisie étrange que de traiter d’entomologiste l’homme qui a écrit l’introduction de l’Histoire de la littérature anglaise, les chapitres sur Milton et sur Shakespeare,