Page:Lemaître - Les Contemporains, sér4, 1897.djvu/206

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ent suspects, les lettres de Mme de Rémusat à son mari, au contraire, lettres écrites au jour le jour sous l’Empire et récemment publiées, sont une source précieuse pour l’histoire. C’est une correspondance, tout intime, qui n’était pas destinée à la publication. On n’y trouve que des impressions vives, spontanées et sincères. »

« Sincères ? » On a déjà répondu : — Et le cabinet noir ? — « Vives et spontanées ? » Jugez plutôt. Voici une lettre citée par le prince : « Quel empire, mon ami, que cette étendue de pays jusqu’à Anvers ! Quel homme que celui qui peut le contenir d’une seule main ! combien l’histoire nous en offre peu de modèles !… Tandis qu’en marchant il crée pour ainsi dire de nouveaux peuples, on doit être bien frappé d’un bout de l’Europe à l’autre de l’état remarquable de la France. Cette marine formée en deux ans, etc… ; ce calme dans toutes les parties de l’empire, etc…, enfin l’administration, etc… : voilà bien de quoi causer la surprise et l’admiration, etc… » Est-ce que cela n’est pas glacial ? Est-ce qu’une femme écrit comme cela quand elle croit n’être lue que de son mari ?

Mais j’admets qu’elle soit sincère dans ses lettres. C’est possible : après tout, elle avait aimé l’homme et pouvait s’en ressouvenir quelquefois ; et, d’autre part, elle ne pouvait pas ne pas admirer l’empereur. Mais pourquoi ne serait-elle pas également sincère dans ses Mémoires ? Je crois, d’une façon générale,