Page:Lemaître - Les Contemporains, sér7, Boivin.djvu/134

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de façon plus soutenue « le parisien » des dix dernières années ; nul n’en a mieux connu le vocabulaire, la syntaxe, les images, le ton, le geste, et ce que roule cette langue dans ses petits bouts de phrases inachevées et baroques, et les divers argots superposés qui y transparaissent. Il y a même ajouté de nouveaux tics. Cela va, parfois, dans le Vieux Marcheur, jusqu’à la convention la plus extravagante. Le style du père Labosse s’éloigne presque autant du langage usuel que de la prose de Bossuet. On y sent un petit commencement de démence.

Lavedan a connu aussi, mieux que personne, les rites et cérémonies de la toilette et du chic. Là encore, son observation s’exaspère volontiers en une fureur de fantaisie imaginative. Lisez, par exemple, dans Leur beau physique, le soliloque de ce mourant qui se fait apporter sur son lit toutes ses cravates, et les palpe, et les caresse, et s’enivre d’elles mélancoliquement avant d’entrer dans l’éternelle nuit. Cela est proprement lyrique.

Enfin, dans le brillant concours de nos conteurs ou dialoguistes mondains, dans cette lutte à qui nous offrira, sous prétexte de morale ou même sans prétexte, les plus surprenants tableaux de mauvaises moeurs dites élégantes, je crois démêler, chez Henri Lavedan, une peur d’être dépassé, une ardeur de frapper plus fort que les autres et de peindre plus cru, une excitation et comme une ébriété de pinceau. Bref, sa caractéristique est, très souvent,