Page:Lemaître - Les Contemporains, sér7, Boivin.djvu/185

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saint Grégoire de Nazianze eût jugé que cette dame avait seulement commencé à faire son devoir ; et notre République démocratique l’exalte comme une héroïne de la charité.

Et cependant, telle humble femme du peuple donne non seulement le peu de pauvre argent qu’elle gagne à la sueur de son front, mais tout son temps, et toutes ses forces, et tout son cœur, bref, se « sacrifie » à des enfants abandonnés, à des filles sans asile, à des malades, à des vieillards. Il arrive qu’on la signale à l’Académie. L’Académie ne peut pas la nommer officier de la Légion d’honneur : elle lui octroie cinq cents francs, — auxquels elle joint, il est vrai, un mot spirituel et, quelquefois, un compliment ironique.

Je prie les gens très riches qui peut-être liront ceci, de ne point se dire : « Voilà une singulière façon, et bien engageante vraiment, de nous prêcher la charité ! Si, d’avoir donné vingt millions aux pauvres, cela vous attire de telles oraisons funèbres, nous avons donc deux raisons pour une de garder notre bel argent. »

Ces personnes se tromperaient. Non, encore une fois, ceci n’est point un discours de haine. Je n’ai pas nié un instant le rare mérite de la dame dont