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ANTHOLOGIE DU XIXe SIÈCLE.



MÉLANCOLIE




Je connais une vierge, une vierge du Nord :
Son front est pâle, hélas ! mais douce est son image ;
Elle aime à visiter, le soir, les champs de mort,
À rêver dans les bois et le long de la plage.

Même quand le printemps sourit à notre espoir,
Elle marche pensive et la tête baissée ;
Mais elle a tant de grâce, elle est si belle à voir,
Qu’on la suit pas à pas comme une fiancée.

Et moi je l’ai suivie avec entraînement,
Tantôt dans les forêts, tantôt au bord de l’onde.
Dès ce jour, elle vient me prendre à tout moment,
Dans le calme des champs, dans les rumeurs du monde.

Oh ! fuis-la, si tu veux garder la paix du cœur :
Cette vierge du Nord, c’est la Mélancolie.
Et quand on a connu son doux regard rêveur,
Et son muet baiser, jamais on ne l’oublie.



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