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JOSEPH AUTRAN.


La côte, l’autre soir, grondait ;
L’onde accourait sous la tourmente,
Et sur la grève, au loin fumante,
Énorme, elle se répandait.

Les hommes sentaient en silence
Trembler le môle et le rocher :
Ils contemplaient, sans approcher,
L’irrésistible violence.....

Tu vins ; tu vis cette fureur,
Tu dénouas soudain ta robe,
Et dans le flot, qui te dérobe,
Tu plongeas du front sans terreur.

Scène d’effroi ! spectacle étrange !
Tu triomphais des flots amers.
Étais-tu la reine des mers ?
De la tempête étais-tu l’ange ?

La plage admirait. — Le soleil,
Retournant à son lit de gloire,
Sur tes bras, sur tes pieds d’ivoire,
Imprimait un baiser vermeil.

Toi, tu jouais dans sa lumière ;
Dressant ta tête aux blonds cheveux,
Tu repoussais d’un bras nerveux
Les flots mêlés à ta crinière.

Dans l’écume et dans le rayon
Tu flottais, ô nageuse insigne,
Déployant des blancheurs de cygne
Et des souplesses d’alcyon.